Schüwer Boss Hugo

Né en 1981 à Poitiers, de nationalité Franco-suisse, Hugo Schüwer-Boss enseigne depuis 2013 la peinture à l’ISBA.
Hugo Schüwer-Boss vit et travaille à Besançon ou il a cofondé deux artist run spaces ; Toshiba House, 2009-2016 et Sunset (RS) avec Christophe Gaudard depuis 2016.
Outre des résidences à la Friche Belle de mai à Marseille et au Frac Alsace, il a exposé à la villa Arson à Nice, au Confort Moderne à Poitiers, au centre d’art Forde, au Hunter College à New York, à la Villa Medicis de Rome et au Mamco de Genève, participé à la première biennale de Belleville et au 55e salon de Montrouge.
Après l’obtention du 1 % culturel de la douane de Delle-Dellemont ; son travail a rejoint les collections du Frac franche Comté, du Frac Limousin, du Consortium à Dijon, et du Fonds national d’art Contemporain.
En 2018, le Frac Franche comté lui a consacré sa première exposition monographique en institution.
Hugo Schüwer Boss est représenté chez Maison contemporain depuis juin 2020.
"Scène ouverte".
Les peintures d’Hugo Schüwer Boss opposent une fin de non-recevoir à une définition précise et mortifère de l’image.
Preuve en est de la large palette utilisée et de la diversité des traitements : touches enlevées, gradients de couleurs, solvants, laissent apparaître peu ou prou le support et la matière.
L’artiste s’autorise ces aller-retours d’une série à l’autre pour empêcher le protocole de s’immiscer et amener l’improvisation dans une peinture initialement marquée par le hard edge.
Aussi, les formes peintes participent-elles de cette recherche de surprise : la composition a beau être simple, centrée, sans ambages, et géométrique, elle n’est pas conçue comme une pure abstraction autotélique.
Plutôt qu’un monde sans images, c’est un moment avant ou après leur apparition qui est transposé sur la toile. Image-fantôme, image-labile qu’on retrouve dans le symbole du phalène utilisé par Georges Didi-Hubermann dans son ouvrage éponyme, lapidoptère qui danse devant la flamme avant de s’y consumer.
C’est-à-dire que les œuvres sont autant de prodromes, espaces de latence avant la crise : elles tremblent, comme au seuil de quelque chose.
Surfaces potentielles de figuration qu’elles approchent sans jamais y tomber complètement, elles ont en ce sens le rôle de scènes ouvertes, dans l’expectative de l’évènement à venir.
Dans la série Waiting room, l’artiste projette justement les œuvres dans des décors montés de toute pièce - entrepôts, lieux abandonnés, chapelles -, qu’elles activent, ornent, éclairent d’un jour nouveau.
Hugo Schüwer Boss ne rejette par ailleurs pas la dimension décorative de son travail en général, puisqu’il se réfère aux grands formats comme des “lointains au théâtre, prêts à accueillir des personnages”.
Dans cette attention à la mise en espace, il n’est pas anodin que les tableaux soient pensés en séries, c’est-à-dire en ensembles non-dissociables d'œuvres qui forment côte-à-côte un environnement.
On pense notamment à la série Roman, qui mime la forme d’arches romanes dans des grands pans de couleurs diaphanes.
Hugo Schüwer Boss mentionne ces artefacts colorés dans l’art religieux qui font disparaître la pesanteur de la maçonnerie : ici, le dégradé lumineux induit une sensation d’espace.
Mises en relation, les œuvres sont englobantes et symptomatiques dans leur déclinaison : elles rappellent le pouvoir diffractant du montage et surtout l’importance du contexte où se situe chaque image.
La présence des tableaux est décuplée, comme lorsque se sent le soleil taper dans le dos.
De cet intérêt pour l’appareil d’exposition résulte le choix de l’artiste d’un accrochage des œuvres dans l’espace urbain, pour déplacer les pièces hors du white cube et de leur sédentarité.
D’où également l’absence de cadre qui n’oppose aucune limite à la peinture et la sort de son écrin sanctuarisant pour l’exposer nue.
Pour le sujet regardant, il n’y a dès lors plus de frontière entre le champ de l’art et son hors-champ.
Le jeu sur les formes géométriques alimente ce statut indéfini : les liserés blancs des compositions graphiques ou la présence régulière de motifs génériques (montagnes, arches, cercles, vagues) stylisent les tableaux dans une fibre numérique et leur confèrent en même temps un caractère emblématique, les apparentant à une signalétique ou à des symboles hiérophaniques.
Plus matiérées, les séries de toiles non enduites de lin brut s’opposent à ces illusions de spectres colorés tout en conservant l’aspect cryptuaire de l’image dans l'accentuation du geste.
Dans les deux cas, les couleurs sont “exhalées au bon endroit”, pour reprendre une formule d’Henri Michaux à propos de Paul Klee.
Puisés dans la culture pop-rock, les titres congédient toute hiérarchisation disciplinaire, et, associés à la pluralité des formats (petits, grands, triangulaires ou en tondos) privilégient le lâcher-prise et le one shot, terme que l’artiste rattache encore une fois au domaine musical.
Le large panel de styles picturaux fait de chaque tableau un phénomène, sorte d’image-kairos qui se cristallise au bon moment sur la toile.
Comme des formes prémonitoires, les œuvres se font presque à l’insu de l’artiste, qu’il se contenterait de retranscrire.
La référence qu’établit d’Hugo Schüwer Boss avec la photographie primitive est de fait significative, en ce que l’image attend d’être développée, catalysée, dans un processus d’apparition quasi chimique.
Ainsi, il s’agit d’une image analogique, par opposition à l’image numérique, qui, elle, est reproductible à l’infini, mais également au sens d’une science des correspondances qui crée une unité dans les oppositions, tel que l’entendait Octavio Paz : “L'analogie est la métaphore où l'altérité se rêve unité et où la différence se projette illusoirement comme identité”.
Elora Weill-Engerer.
Critique d’art / Commissariat d’exposition Membre de l’AICA (Association Internationale des Critiques d’Art)
(1). Georges Didi-Huberman, Phalènes - Essais sur l'apparition, 2, Paris, Ed. de Minuit, 2013.
(2). Henri Michaux, préface à Will Grohmann, Paul Klee, Flinker, Paris, 1954, p. 5.
(3). https://www.frac-franche-comte.fr/fr/hugo-schuwer-boss-every-day-exactly-same
(4). Octavio Paz, Point de convergence, Paris, Gallimard, 1976.
Born in 1981 in Poitiers, of Franco-Swiss nationality, Hugo Schüwer-Boss has been teaching painting at ISBA since 2013.
Hugo Schüwer-Boss lives and works in Besançon where he co-founded two artist run spaces; Toshiba House, 2009-2016 and Sunset (RS) with Christophe Gaudard since 2016.
In addition to residencies at the Friche Belle de Mai in Marseille and at the Frac Alsace, he exhibited at the Villa Arson in Nice, at the Confort Moderne in Poitiers, at the Forde art center, at the Hunter College in New York, at the Villa Medicis de Rome and Mamco in Geneva, participated in the first Belleville biennial and the 55th Montrouge salon.
After obtaining the cultural 1% from the customs of Delle-Dellemont; his work has joined the collections of the Frac franche Comté, the Frac Limousin, the Consortium in Dijon, and the National Contemporary Art Fund.
In 2018, the Frac Franche Comté dedicated its first monographic exhibition to him in an institution.
Hugo Schüwer Boss has been represented at Maison Contemporain since June 2020.
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