Colussi Guillaume
Ni derrière, ni devant, mais au cœur d'un itinéraire qui s'établit dans la dissimulation du combat entre l'artificiel et l'organique, la chose construite et l'apparition, le modèle contraint et l'autonomie, et qui choisit de rendre au geste sa précision uniquement par crainte de froisser la beauté.
Ce qui se construit ici est le mouvement musical de la géométrie.
Celle qui fut la philosophie première, quand le cercle et le cube étaient entendus comme pensée pure, comme seul accès valable aux nuances du monde.
Car l'intimité quotidienne avec l'objet va révéler quelque chose.
Peinture de la patience, ces toiles ne peuvent être dissociées du temps passé devant, lorsque les yeux s'habituent à ce que d'autres ont pris en économie, à ce qui n'est plus montré mais évoqué, et qui désormais ne pourra plus partir : l'incarnation par le retrait d'une vie en filigrane.
En l'occurrence, Guillaume Colussi ose dégrader l'un des symboles de l'absolu - le monochrome - en le précipitant dans le sombre abîme du temps.
En stigmatisant, il incarne.
Et c'est depuis cette tension, celle d'un regard contemporain sur la modernité, qu'il conduit l’œuvre jusqu’à l’acte minimale. Unretranchement des formes jusqu’au silence.
Alors,
quand il n’y a plus rien, il y a la couleur.
Mais troublée par le geste, qui lorsqu’il est liquide enlève et révèle, lorsqu’il se pigmente ajoute et crée, infuse l’accident matériel de l’intime.
Cette abstraction ainsi délivrée figure la lumière.
La lumière explose la forme.
La peinture fait image.
Abolissant de fait ce que d'autres auraient voulu comme contradictoire, c'est-à-dire une peinture graphique qui n'incarnerait pas l'émancipation de ses formes, qui ne se livrerait pas entièrement à l'interprétation de son public, Guillaume Colussi nous démontre que l'effacement de l'artiste face à son œuvre reste dans le monde de l'immédiateté la dernière incarnation du sens.
Satori
in « L’effacement du peintre » (2020).
Guillaume Colussi est représenté sur Maison contemporain depuis septembre 2020.